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EUGÈNE BOUDIN – 1824-1898

Eugène Boudin – Erwan Le Saëc

Eugène Boudin naît à Honfleur le 12 juillet 1824 et meurt à Deauville le 8 août 1898.

Fils de marin, le jeune Boudin accompagne son père comme mousse sur le bateau qui fait la liaison Le Havre-Hambourg.

Il aime et connaît la mer naturellement et les navires lui sont familiers.

Quand sa famille emménage au Havre, Boudin est placé comme jeune commis dans une boutique de papeterie. Il va pouvoir développer son penchant artistique en crayonnant avec passion et acharnement. Le jeune homme s’établit bientôt, avec un associé, dans sa propre maison de papeterie- encadrement.

Il y croise des peintres, auxquels il montre ses premiers essais et qui l’encouragent à poursuivre sa voie. En 1851, grâce à de bons contacts et une bourse d’études pour trois années, il peut s’inscrire comme élève copiste au Louvre, dans l’atelier d’Eugène Isabey. Il y rencontre Jongkind, Courbet, Monet avec lesquels il se lie d’amitié. Le trio Monet, Jondkind, Boudin s’enrichit mutuellement de ses recherches dans le traitement de la couleur, la maîtrise de l’aquarelle, la subtilité des cadrages.

Charles Baudelaire a vu les études de ciels au pastel de Boudin et admire ses compositions pour leur justesse. En critique avisé, il apprécie les effets atmosphériques du peintre. « Vous devinez la saison, l’heure et le vent », ainsi s’exprime-t-il en 1859.

Etude de ciel  (pastel) – Eugène Boudin – (collection particulière)

Pourtant le travail de Boudin est encore loin d’être estimé à sa juste valeur.

Il est tributaire des marchands qui vendent directement aux collectionneurs, sans qu’il touche les bénéfices directs. La reconnaissance officielle arrivera au cours des années 1880, quand l’Etat lui achètera des toiles exposées au salon.

Il ne peut se résoudre à vivre à Paris, reste fidèle à la Normandie et retourne régulièrement à Honfleur.

Malgré les difficultés et une situation financière précaire, il poursuit ses recherches sur la lumière.

Il découvre la Bretagne vers 1855, y viendra chaque été jusqu’en 1878, puis une dernière fois en 1897.

Eugène Boudin ressent le besoin d’exécuter ses toiles sur le vif, en plein air.

Opportunément, la nouvelle ligne hebdomadaire par bateau Le Havre-Morlaix lui permet de se rendre dans le Finistère en 1857 « Ce pays…l’objet de mes rêves » Il y découvre une diversité de sujets, pardons, marchés, paysages de mer et de côtes.

Boudin en rapporte de nombreuses études et croquis. Avec une application minutieuse, il étudie les gréements des grands navires, analyse en ethnologue le monde qui l’entoure.

En 1858, il est très impressionné par le pardon de Sainte-Anne-la Palud, sujet dont il compose une grande toile qu’il expose pour la première fois au salon de Paris de 1859.

Croquis préparatoire pour le pardon de Sainte-Anne-la-Palud – musée du Louvre – département des Arts Graphiques
Le pardon de Sainte-Anne-la-Palud – Eugène Boudin – vers 1858 – Musée d’art moderne André Malraux – Le Havre

Georges Jean Aubry (1882-1950) dans sa biographie décrit ainsi le personnage : « Il était grand, légèrement voûté, les bras un peu ballant […] sa démarche était lente et balancée : celle des marins que rien ne hâte quand ils sont à terre. Sa voix était sourde, sa parole lente avec l’intonation toujours égale de ceux qui parlent peu et à qui importe plus ce qu’ils disent que la façon dont ils l’expriment. L’oeil bleu toujours aux aguets, l’oeil vif, inquisiteur, en mouvement dans le visage serein, les narines mobiles, toujours à flairer le vent […] Tout le visage s’offre [..] comme découvert au vent, au soleil à la pluie et dans cet abandon serein, seuls les deux yeux bleus veillent, saisissent […]

Eugène Boudin rencontre sa future épouse, Marie-Anne Guedes, originaire d’un milieu paysan de Hanvec, près du Faou. Elle devient son guide pour pénétrer l’intimité domestique des populations au contact desquelles, il dit qu’il se « bretonnise ». Ils se marient en 1863.

Boudin se sent bien auprès de cette nouvelle parenté bretonne et s’attache profondément au pays.

Il multiplie ici les croquis sur le vif, les note patiemment par souci documentaire, puis travaille son sujet une fois rentré chez lui.

Groupe de bretonnes – galerie de la Présidence- Paris
Intérieur d’église

Il n’imagine pas peindre des sujets d’imagination, parce que l’académisme lui est étranger.

Il peint ce qu’il a autour de lui, en choisissant ses cadrages pour la lumière : « Je regarde cette lumière qui inonde la terre, qui frémit sur l’eau, qui joue sur les vêtements, et j’ai des défaillances de voir combien il faut de génie pour saisir tant de difficultés ».

A Douarnenez, il découvre avec enthousiasme les paysages de bord de mer :

« Il est impossible de regretter la Normandie, ce pays étant peut-être encore plus joli ».

Soir sur la plage – pastel – Eugène Boudin

Boudin écrit encore à son frère Louis : « le ciel devient superbe, lie-de- vin, verdâtre, d’immenses nuages sont emportés dans l’air et vers les lointains. La mer clapote et s’agite, déplacée par le bateau qui plonge et se relève dans ce vaste clapotis. A la crête de chaque vague, une aigrette lumineuse est emportée par le vent. Le soleil se dégage et tout se transforme dans le ciel, les nuages argentés sur fond bleu, vapeurs plus brumeuses mais les nuages lie-de-vin traversent encore l’atmosphère sur ce beau fond ».

Tous les déplacements d’Eugène Boudin se feront en quête de lumière sur les régions côtières.

Il trouve de « beaux grands ciels, tout tourmentés de nuages, chiffonnés de couleurs, profonds, entraînants ».

Quand un endroit lui plaît, il y revient plusieurs saisons successives surtout l’été et à l’automne. Ainsi ce sont près de 400 tableaux et 700 dessins et aquarelles que lui inspirent Le Faou, Landerneau, Douarnenez, Plougastel, Camaret dans le Finistère et dans les Côtes du Nord au Portrieux.

Même si la Bretagne lui offre une variété infinie d’horizons, des ciels mouvants et des lumières changeantes, Eugène Boudin se partage dorénavant entre Deauville où il a fait construire une villa et Paris où il vit désormais. En 1898, se sentant très affaibli, il demande à être conduit pour mourir « face à la mer » et s’éteint dans sa maison de Deauville, au matin du 8 août de cette même année.

Eugène Boudin âgé – Erwan Le Saëc