Ile de la Comtesse
Promenade sur la Comtesse – L. Meheut – 1886
Une ile cultivée
Fermant la plage, l’île de la Comtesse, accessible à marée basse, est ainsi nommée en l’honneur de Marguerite de Mayenne (1208-1248) qui l’avait reçue de son époux Henri d’Avaugour, seigneur de Penthièvre. Elle a donné son nom à la plage et au quartier qui l’entoure. A la fin de sa vie, veuf, Henri d’Avaugour devenu moine bénédictin au couvent des Cordeliers de Lehon fit don d’une partie de ses biens, dont l’île de la Comtesse, au monastère qui en est resté propriétaire jusqu’à la Révolution.
Les inventaires des biens du monastère réalisés au 17e siècle montrent que l’île était autrefois cultivée et source de revenus.
Un jardin botanique ?
Propriété de la commune depuis 1975, l’île a connu de multiples propriétaires qui se sont succédé pendant les 19e et 20e siècles.
L’un d’eux était Auguste Le Maoût (1817-1897), pharmacien exilé à Londres à cause de ses idées républicaines et ami de Victor Hugo. Son épouse avait acquis l’ile de la Comtesse en 1872 et possédait une villa à Saint-Quay-Portrieux. Ce sont les époux Le Maoût qui firent construire les murs encore visibles pour abriter des vents un potager et un jardin botanique dont les plantes entraient dans les préparations pharmaceutiques. Un vivier, au pied de l’île permettait de conserver poissons et crustacés. Une petite maison occupait le sud de l’île.
Seules quelques pierres signalent cette ancienne présence.
Eugène Rimmel
Auguste Le Maoût a sans doute connu un autre ami de Victor Hugo : le grand parfumeur Eugène Rimmel. Mais qui était Eugène Rimmel ?
Né à Paris en 1820, il s’installa à Londres pour ouvrir une boutique de parfums avec son père. Eugène, créateur de parfums et homme d’affaire, rencontra rapidement le succès. Ses parfums lui ouvrirent les portes de la haute société londonienne, il devint fournisseur de la cour d’Angleterre et sa notoriété était internationale. Créateur de produits cosmétiques, il inventa le premier mascara non toxique, le rimmel, dont le nom est devenu générique.
Il se dit qu’à Saint Quay Portrieux, où il possédait une villa, Eugène Rimmel récoltait les plantes de l’île de la Comtesse et de champs voisins pour fabriquer ses parfums et le célèbre « vinaigre de toilette » qui fit une partie de sa renommée. La fille d’Eugène Rimmel et son mari ont d’ailleurs racheté l’île de la Comtesse en 1898.
Les plantes de l’île de la Comtesse ont-elles contribué à la renommée d’Eugène Rimmel ? C’est vraisemblable. Mais… peut-être n’est-ce qu’une belle histoire !
Que reste-t-il de ce jardin ?
L’île de la Comtesse est constituée d’un socle granitique avec un peu de terre arable en partie rapportée pour pouvoir cultiver.
Dès l’entrée du chemin d’accès, la criste marine, une des rares plantes capables de survivre dans les endroits régulièrement atteints par les embruns, indique qu’on est ici entre terre et mer….
Côté nord et est se retrouvent les essences habituelles des falaises bretonnes dont les graines ont été apportées par le vent et les oiseaux, aubépines, prunelliers, troènes rustiques, fougères, valérianes, giroflées…
Mais côté sud et ouest, nombre d’essences sont manifestement les vestiges des anciens jardins où les murs créaient des espaces protégés.
Figuiers, poiriers autrefois palissés, iris des jardins, agapanthes, tamaris, laurier-tin (ou viorne-tin), buis, saule argenté, anciens rosiers, grand houx, romarin, euphorbes des garrigues et grands cyprès de lambert n’ont pas été apportés par les vents !
Criste marine
Quelques-unes de ces plantes comme l’aubépine, le houx, la clématite des haies, le saule, le tamaris… sont connues pour leurs propriétés médicinales
Admirez-les au milieu du fenouil et des herbes folles.
Respectez-les ! Profitez de cette île, lieu de rêverie et de flânerie, qui vous offre des échappées vers des paysages marins exceptionnels.