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L’orientalisme

Salon mauresque du château de Monte-Cristo – port Marly -1845

Une fascination qui vient de loin

Depuis longtemps l’Orient nourrit l’imaginaire de voyageurs aventuriers, attire des explorateurs curieux et des hommes de science. Artistes et écrivains trouvent là une source d’inspiration exotique inépuisable.

Un orient fantasmé se trouve par exemple dans le bourgeois gentilhomme de Molière (1670). La première traduction française des « Mille et une nuits » date de 1704, sans illustration puis avec des illustrations occidentales bien entendu pour les éditions suivantes. Citons également les « lettres persanes » de Montesquieu (1721), les opéras de Mozart (l’enlèvement au sérail 1782), les « orientales » de Hugo en 1829… 

Chapelle Sainte-Anne Saint-Quay-Portrieux
Les mille et une nuits – illustrations de l’édition de 1839  – BNF
Chapelle Sainte-Anne Saint-Quay-Portrieux

L’orientalisme au 19e siècle : d’une vision romantique à l’authenticité.

Le terme « orientalisme » fait son apparition au début du 19e siècle. Il désigne la manière dont l’Orient est vu par l’Occident, le regard que porte sur les paysages et les êtres l’occidental imaginant l’orient. Bien loin de la réalité… Littérature, peinture, musique, photographie, architecture, toute la production artistique du 19e est teintée d’influence orientale, dans une vision romantique, inspirée essentiellement par l’Espagne, l’Inde, la Turquie et les pays du Maghreb.
Sur les boulevards parisiens, les cafés turcs sont nombreux et les bals publics sont décorés dans le style mauresque. Les expositions universelles proposent des échappées faciles vers des contrées exotiques. Les éléments décoratifs orientaux se retrouvent dans les maisons privées.

Chapelle Sainte-Anne Saint-Quay-Portrieux
l’illustration 2 mars 1867 – quartier turc – Gallica

Vers le milieu du 19e siècle, de vrais amoureux de l’Orient s’y rendent pour de longs voyages rendus plus aisés par les progrès des transports. En amateurs avertis, peintres, écrivains, photographes, architectes, pourront ainsi rendre compte d’un Orient plus authentique. 

Chapelle Sainte-Anne Saint-Quay-Portrieux
Boudoir turc, hôtel de Beauharnais – Paris 1807

Quelques exemples de voyageurs connus :

Eugène Delacroix (1798-1863) accompagne pendant 7 mois en 1932 une mission diplomatique auprès du sultan du Maroc. Il en est profondément marqué et reviendra souvent sur le thème marocain.

Carnets de voyage d’Eugène Delacroix ( Musée du château de Chantilly)

Après un voyage en Algérie en 1846, Alexandre Dumas père fait réaliser dans son château néo renaissance de Port Marly un magnifique salon mauresque, décoré par deux artistes tunisiens.

Salon mauresque – Château de Monte-Cristo – Port Marly

Contemporain de la construction du château de Calan, citons Pierre Loti (1850-1923), officier de marine, qui se nourrissait de ses voyages pour écrire ses romans, dont « Aziyadé » en 1879 et « fantôme d’Orient » en 1892. Il transforma sa maison natale de Rochefort en palais oriental. 

Maison de Pierre Loti – Rochefort (Charente Maritime)
Portrait de Pierre Loti en turc – BNF

L’orientalisme en architecture

L’engouement pour les voyages orientalistes et la nouvelle passion artistique qui s’ensuit, inspirent de riches propriétaires érudits et collectionneurs. Ils font édifier des villas dans un style architectural oriental dont la réalité archéologique est quelque fois transformée dans une mise en scène occidentale.  

Villa Sans-gêne – Agon-Coutainville – 1896
Villa mauresque – Levallois Perret – 1892
Villa mauresque – Hyères – 1881

Galerie de photos

Institut de biologie marine Michel Pacha – La Seyne sur Mer – 1900
Etude pour bains publics – ALexandre Marcel – 1880
Bains dunkerquois – 1897
Etablissement thermal des Salies de Bearn – 1889
Csino mauresque d’Arcachon (détruit par incendie en 1977) – 1863 – © Patrick Charpiat

    Faites défiler les images de gauche à droite.

    Mais ces magnifiques réalisations demandent un entretien considérable. Au fil des ans et des propriétaires, elles survivent difficilement. Les parcs sont divisés, de nombreuses villas sont transformées en hôtels ou démolies.

    Sur la côte bretonne, on trouve peu d’exemples de cette vogue de l‘architecture orientaliste. 

    Le « pavillon du prince de Galles » commandé par le futur Edouard VII, pour figurer à l’exposition universelle de 1878 à Paris et y représenter les Indes, comprenait deux parties dont l’une fut vendue à la station balnéaire de Paramé pour y être installé sur la digue en 1881 et louée comme maison de villégiature. Elle fut détruite par une tempête vers 1905. L’autre partie se trouve à Courbevoie, dans le parc de Becon et existe toujours. 

    Pavillon du prince de Galles – 1878
    Villa Constantine – Saint Lunaire – vers 1880

    A Saint-Lunaire, la villa Constantine construite comme la villa Kermor vers 1880, sur la pointe du Décollé, sera transformée dans les années 1960 avant d’être démolie peu après.

    La villa Kermor reste aujourd’hui le seul témoignage en Bretagne de ces « folies ». 

    Sources :
     Architectures d’Orient en France - Nabila Oulebsir et Bernard Toulier – photographies de Jean-Christophe Dartoux – Ed Picard – 2018
    L’orientalisme architectural, entre imaginaire et savoir – Nabila Oulebsir et Mercédès Volait – INHA – 2006
    L’orientalisme au 19e siècle : de la fiction vers la réalité – Nathalie H. Rouphael – Connaissances et savoirs - 2015