Le feu de port
Une tourelle métallique
Croquis du feu de port en 1947 – Archives Nationales
Jusqu’à la grande campagne de construction de phares de la seconde partie du 19e siècle l’éclairage des côtes de France était très insuffisant.
En 1853, à la suite des demandes répétées des capitaines et armateurs, la commission des phares fait installer au bout de la jetée du Portrieux un premier fanal fonctionnant à l’huile de schiste, hissé chaque soir en haut d’une potence en charpente et entretenu par un gardien logeant « en ville ». Avant cette date, une simple lanterne était allumée sur la petite falaise dominant le port.
En 1867, le Service des Phares décide de remplacer le fanal, dont la portée est insuffisante, par une tourelle en tôle imaginée et dessinée par Léonce Reynaud (1803-1880 – directeur du service des Phares et Balises de 1846 à 1878) et présentée à l’Exposition Universelle qui a lieu cette même année à Paris. C’est celle que vous voyez encore aujourd’hui au bout de la jetée.
Cette tourelle à 8 pans est composée de panneaux de tôle boulonnés. Légère et rapidement montée, elle peut même être déplacée si les circonstances l’exigent, ce qui a été le cas au Portrieux.
A la fermeture de l’exposition universelle, les diverses pièces de la construction ont été démontées et emballées pour être transportées au Portrieux. Le « phare » installé au bout du premier tronçon de la jetée a été allumé le 10 juin 1868. En 1879, une fois le prolongement du quai effectué, il a fallu à nouveau le démonter et le remonter pour l’installer à sa place actuelle.
Jusqu’à l’électrification en 1948 la lanterne a fonctionné à l’huile de schiste (pétrole) et est restée sous la surveillance d’un gardien logeant en ville.
Actuellement, du fait de la présence du port en eau profonde, le feu de port du port d’échouage n’est plus qu’un feu d’entrée de bassin, à éclats verts, d’une portée de 1,6 mille nautique (2,9 km). Il est alimenté par des générateurs photovoltaïques et entretenu par la station des Phares et Balises de Lézardrieux.
Cette originale tourelle de feu de port, produite en série, a été vendue sur catalogue à de nombreux exemplaires. Peu subsistent aujourd’hui, celle du Portrieux est unique dans les Côtes d’Armor. Une démarche est en cours pour obtenir son inscription à l’inventaire des Monument Historiques.
Le feu de port à l’exposition universelle de 1867
La seconde exposition universelle de Paris se tient du 3 avril au 3 novembre 1867 sur l’esplanade du Champ de Mars. C’est la vitrine du Second Empire. 41 pays y sont représentés, avec plus de 50.000 exposants. Les statistiques font état de 30 millions de visiteurs.
Les thèmes dominants de l’exposition sont le modernisme et l’histoire du travail. Les constructions métalliques sont à l’honneur. Un « pavillon des phares » présente les prototypes de lentilles qui équiperont les phares réalisés dans le cadre du grand programme d’éclairage des côtes démarré dans les années 1830.
Sur les berges de la Seine, est présenté… le « phare » (feu de port) qui est aujourd’hui au Portrieux ! Pendant les sept mois que dure l’exposition, il domine le port de plaisance installé pour la circonstance. Les joutes nautiques et régates qui s’y déroulent sont une des innovations et attractions de l’exposition universelle…
L’exposition universelle illustrée – 11 juillet 1867
[…] En amont du pont d’Orsay, sur la berge de la Seine, est une tourelle métallique, de section octogonale. Cette tourelle, élevée de 8m à son balcon, sert aux signaux pendant les temps de brume, alors que le feu du fanal est impuissant à signaler l’entrée du port. Elle a des feux à éclats rouges de 20 secondes en 20 secondes, alimentés par une lampe à huile de schiste, une sonnerie est installée sur le balcon, qui sert aux signaux à défaut des feux. Chaque sonnerie a sa notation particulière, pour prévenir des confusions : elle donnera le signal de partance aux canots joutant dans le bassin du pont d’Iéna, et non plus cette fois aux navires en perdition […]
L’exposition universelle de 1867 illustrée. Publication internationale autorisée par la Commission Impériale – Premier volume – Rédacteur en chef : François Ducuing.
Le « phare » vu par Erwan Le Saëc.