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Paul Signac – 1863-1935

Paul Signac naît à Paris dans une famille bourgeoise. Ses parents le destinaient à l’architecture, mais il est très tôt attiré par la peinture.

A 16 ans, il est touché par les toiles de Manet, Caillebotte, Pissarro, Degas, vues au quatrième salon des impressionnistes. Il admire le travail de Monet auquel il demandera des conseils.

Signac décide de quitter le lycée en 1880 pour s’initier à la peinture, en travaillant dans l’atelier d’Emile Blin à Montmartre. A cette époque, il revendique des idées anticonformistes, manifeste un constant besoin d’évasion et adhère à un groupuscule proche des anarchistes, « les harengs saurs épileptiques baudelairiens et anti-philistins » (au sens anti bourgeois).

En 1892, Paul Signac se marie avec Berthe Robles, lointaine cousine de Pissarro, rencontrée au Chat Noir. Ils viendront ensemble au Portrieux.

Signac jeune en 1883

Malgré ses liens fusionnels avec Berthe, Signac rencontre une jeune artiste Jeanne dont il aura une fille, Ginette, en 1913. Il séjourne dorénavant à Antibes avec sa nouvelle compagne. Ginette épousera le fils de Marcel Cachin, natif de Paimpol. Leur fille Françoise Cachin, historienne d’art est l’auteure de « Signac catalogue raisonné de l’œuvre peint ».

Paul Signac est nommé peintre de la Marine en 1915. A partir de 1929, il se lance dans une série d’aquarelles des ports de France, projet qui lui tenait à cœur. Au rythme de ses voyages jusqu’en 1931, il exécute une série d’aquarelles qui couronne le talent de l’artiste amoureux du monde de la mer.

Il décède à Paris en 1935.

Portrait de Paul Signac – Georges Seurat
portrait de Signac – Erwan Le Saëc
Photo de Signac en 1923

Signac peintre et marin

Signac a deux passions, la peinture et le nautisme. C’est un marin infatigable, épris de liberté, bon navigateur et fin régatier.

Vêtu d’un pull à col roulé et coiffé de sa casquette, il navigue le long des côtes méditerranéennes et bretonnes. En connaisseur du monde de la mer, il arpente les quais, observe les bateaux et les aires de carénage dans les ports. A Saint Malo, il se passionne pour ces grands voiliers de travail qui partent sur les bancs de Terre-Neuve.

Il possédera 32 bateaux, de la barque de rivière au yacht de plus de dix mètres dont un cotre, commandé dans un chantier de Roscoff, qu’il baptise Olympia en hommage au tableau éponyme de Manet qui avait fait scandale. Vivant à bord, il remporte de nombreuses régates entre Douarnenez et Concarneau.

Il nommera avec humour une de ses embarcations le hareng saur épileptique et une autre le tub, en référence à un pastel de Degas et jeu de mot pour désigner le bateau qui se remplit à la gite.

La mer et les bateaux tiennent une part essentielle dans la vie de l’artiste. Il multiplie ainsi ses voyages en bord de mer, dans le midi, la Hollande, l’Angleterre, l’Italie et les côtes de la Manche.

Signac sur son bateau – Theo van Rysselberghe – 1896 – © Bridgeman images.

Signac et la Bretagne

C’est son ami Seurat, son goût de la mer et sa passion de la navigation qui l’amènent une première fois à Saint-Briac en 1885. Toujours à la barre d’un bateau, il fait escale à Saint-Malo, Saint Cast et dans tous les ports environnants.

Lézardrieux les bateaux – Paul Signac – © Bridgeman Images
Le pont de Lézardrieux – Paul Signac -© Bridgeman Images

Signac fait également des haltes régulières à Lézardrieux. Il hiverne son bateau dans le Trieux, au parc des phares et balises et loue une maison à Kermaquer en Lézardieux de 1924 à 1930, près de son parent Marcel Cachin. L’archipel de Bréhat n’a pas de secret pour lui. Il découvre les dessins de Louis Marie Faudacq et en collectionnera les carnets, émerveillé par la virtuosité du trait des illustrations. Il se rapproche de Charles Lapicque qui navigue autour de l’Arcouest, connaît bien Henri Rivière avec lequel il a partagé un atelier en 1882.

C’est parce qu’il admire la série de scènes maritimes de Boudin peintes au Portrieux que Paul Signac vient jeter l’ancre dans le port en 1888. C’est donc par la mer qu’il découvre le Portrieux, en compagnie de son épouse Berthe et d’un couple d’amis. Il écrit « Port de Portrieux. Jetées, sloops, amers, yawls, sémaphore, goélette islandaise, mauvais cailloux, phare et balises : synthèse d’un petit port breton. » (Denise Delouche)

Tout en intriguant les autochtones par sa traduction toute personnelle du paysage, il réalisera une dizaine de toiles lors de son séjour. Le poète symboliste Jean Ajalbert, qui l’accompagne, écrit : « Tandis que Paul Signac sur la jetée, peignait une marine où les indigènes ne reconnaissaient guère leurs mâts et leurs voiles […], on traversa de Portrieux à Jersey ». (Cité dans le catalogue d’exposition Metropolitan Museum of Art NY)

En effet, le peintre retranscrit sur la toile, de façon spontanée les émotions qu’il ressent, en petites touches juxtaposées de couleurs pures pour nous révéler le scintillement de la lumière et le miroitement sur l’eau. Signac dira qu’il « voulait pousser chaque coin de la toile à l’extrême absolu en termes de couleur ». Et c’est tout le scintillement de la lumière et le miroitement sur l’eau qui apparaissent. « À Portrieux, Signac a peint des marines avec un équilibre et une douceur qu’il n’a peut-être jamais égalés. Signac avait été particulièrement sensible à la poésie austère de ces paysages faits du jeu de l’eau, de la lumière et de la roche. C’est à Portrieux qu’il s’est le plus attaché aux valeurs décoratives et synthétiques des lignes, aux effets de contraste.»(Françoise Cachin)

                       Signac au travail – Erwan Le Saëc

La Comtesse opus 191 – Paul Signac – © Bridgeman images

Le Gourvelot – Paul Signac – Musée d’Art d’Hiroshima

Le phare opus 183 – Paul Signac – musée Kröller Müller

La jetée par temps gris – Paul Signac – Musée Kröller Müller

Les cabines de bain plage de la comtesse – opus 185 – Paul Signac – musée d’art Nelson-Atkin


    Signac collectionneur

    En collectionneur passionné, Signac achète ou échange, avec un œil avisé, des toiles, des dessins, des croquis et des estampes qu’il étudie aussi pour approfondir ses connaissances. Il est conscient de vivre parmi des peintres brillants, souvent ses amis, et les œuvres qu’il acquiert reflètent son regard sur ses choix artistiques. Sa collection, de quelque 400 œuvres, a fait l’objet d’une exposition au musée d’Orsay, d’octobre 2021 à février 2023.

    Cet inlassable curieux aura montré un profond intérêt pour ses pairs en leur vouant une admiration toute professionnelle.


    Signac, la couleur jusqu’au pointillisme

    Sa rencontre avec Georges Seurat (1859-1891) et Camille Pissaro (1859-1891) au salon des indépendants de 1884 est déterminante pour le sens qu’il va donner à son travail. Ce salon, sans jury, ni récompense, accueille les artistes qui ont été refusés par le comité du salon officiel jugé trop sévère par rapport à une forme d’orthodoxie impressionniste et souhaitent exposer leurs œuvres librement, sans carcan.

    Seurat, initiateur de la technique du chromo-luminarisme et Signac vont fonder le groupe des « impressionnistes scientifiques » et projeter dans leur peinture les bases d’un nouveau mouvement, le pointillisme.

    Le Tertre Denis – opus 189 – Paul Signac-© Bridgeman Images

    Paul Signac se passionne pour la science de la couleur qu’il divise selon des règles précises étudiées auprès de chimistes. Les touches de couleurs pures primaires (jaune, rouge, bleu) et secondaires (vert, orange, violet) ne se mélangent pas sur la palette. C’est à l’œil de faire une association harmonieuse en les fusionnant et rendre ainsi les vibrations de la lumière du ciel et de l’eau.

    Après quatre années sans salon, une huitième exposition impressionniste se tient en 1886. Les candidatures sont soumises à Berthe Morisot, en raison de son implication financière dans le projet. Avec une grande ouverture d’esprit, elle invite Signac et Seurat à accrocher leurs œuvres, ce qui n’est pas sans conflit avec certains participants. « Il y a parmi les indépendants des révoltés dignes d’être surveillés » dit un critique dans le Moniteur des arts.

    La reconnaissance viendra avec l’évolution des mentalités.

    En 1891, le décès prématuré de son grand ami Georges Seurat l’affecte beaucoup. Signac part s’installer dans le midi. 

    Toujours en quête d’innovation, il publie en 1899 un ouvrage de réflexion sur la théorie du divisionnisme, d’Eugène Delacroix au néo-impressionnisme, véritable plaidoirie en faveur de cette nouvelle manière de fragmenter les touches de peinture, telles des points.

    En 1909, il est nommé président de la Société des artistes indépendants, fondée par des peintres qui défendent leur liberté d’esprit comme Sisley, Monet, Renoir, Bazille.

    S’intéressant à tous les courants modernistes en peinture, il consacre beaucoup d’énergie à sa fonction jusqu’en 1934 et accueille ainsi les peintres qui peinent à se libérer du joug de la critique.

    Par ses recherches créatives, Paul Signac fait partie des fondateurs de la modernité en peinture, en ouvrant la voie aux artistes Fauves comme Matisse, Derain et abstraits comme Klee, Mondrian, Kandinsky.

    Il est intéressant de noter le parallélisme que fait Signac entre ses œuvres et la musique, puisque de 1882 à 1894, il les répertorie avec des numéros d’opus, pratique qu’il réserve à ses œuvres les plus abouties.

    Une cinquantaine de musées dans le monde possèdent des œuvres de Paul Signac.